Toponymie autochtone
La Charte de la langue française, dans son préambule même, reconnaît aux Premières Nations et aux Inuit le « droit de maintenir et de développer leur langue et culture d’origine ».
L’importance du patrimoine toponymique autochtone tient à son double apport culturel et technique à la géographie du Québec; d’une part, pour la richesse de cet héritage quant à la façon de découper et de nommer l’espace, et, d’autre part, pour l’utilité non moins précieuse de ces noms géographiques dans les territoires réunissant les plus basses densités toponymiques.
La fragilité de la tradition orale qui sert de véhicule principal à la transmission du patrimoine toponymique des autochtones de même que les bouleversements passés, récents ou projetés du paysage des territoires qu’ils fréquentent impriment un caractère d’urgence aux travaux d’inventaire de cette toponymie.
La normalisation de la toponymie autochtone s’appuie sur le respect du génie des langues et sur la nécessité d’établir un corpus de référence pour l’ensemble de la collectivité québécoise.
La politique relative aux noms autochtones s’applique aux toponymes déjà inventoriés désignant des lieux qui se trouvent dans les territoires habités ou fréquentés principalement par les autochtones; elle s’appliquera aussi aux noms géographiques autochtones dont l’inventaire est à venir, peu importe la localisation des entités touchées.
Elle ne s’applique cependant pas aux toponymes officiels d’origine autochtone dont l’usage est historique, sauf pour ce qui regarde des modifications graphiques mineures que la Commission de toponymie estimerait opportun d’apporter.
La Commission considère en outre qu’il faut faire montre de prudence dans l’implantation d’une toponymie autochtone artificielle, à l’occasion de la création de noms de lieux, et en particulier pour les lieux innommés qui se trouvent dans des zones d’exploitation contrôlée ou dans des pourvoiries.
Bien que très nombreux, les noms géographiques autochtones ont fait jusqu’ici l’objet d’une transmission essentiellement orale et n’ont été consignés par écrit que de façon épisodique jusqu’à récemment. La Commission entend donc poursuivre les inventaires toponymiques sur le terrain et dans les documents, le cas échéant; elle encourage les recherches des divers spécialistes et la participation plus importante des représentants autochtones dans cette entreprise d’amélioration de la connaissance des toponymes autochtones.
La Commission consulte les autorités autochtones concernées à l’occasion d’enquêtes toponymiques menées dans les territoires fréquentés par les Premières Nations ou les Inuit. Elle requiert leur opinion quant au degré d’usage des toponymes inventoriés et la vérification de leur orthographe.
Leur écriture pose de délicats problèmes en raison du grand nombre de langues à considérer et à la suite de l’absence de consensus quant à leur normalisation. Sachant que la normalisation est en cours, la Commission ne juge pas à propos d’imposer des règles, mais favorise néanmoins la stabilité des graphies locales.
Les résolutions adoptées lors de l’Atelier sur l’écriture des noms de lieux amérindiens, tenu à Québec en mars 1979, et lors du Colloque sur les noms de lieux autochtones, tenu à Ottawa en mai 1986, constituent, pour la Commission de toponymie, des références privilégiées pour sa pensée et son action dans le dossier des toponymes autochtones.
L’usage courant local guide la Commission de toponymie dans le choix des noms d’entités géographiques situées dans des territoires fréquentés par les autochtones. Les enquêtes toponymiques sur le terrain ou dans les documents, que la Commission effectue, fait effectuer ou supervise, révèlent le degré d’usage des toponymes inventoriés de même que la fiabilité des informateurs.
Pour l’écriture des spécifiques, la Commission s’inspire de l’usage graphique local, de l’usage graphique de l’ensemble d’une nation et de la tradition toponymique observée pour les noms de lieux du groupe linguistique concerné.
Les toponymes autochtones qui contiennent un générique (agglutiné au spécifique ou séparé de celui-ci) dans leur langue d’origine se voient attribuer un générique français lorsqu’ils sont officialisés; ce générique représente la meilleure traduction possible du terme autochtone.
Le générique autochtone séparé n’est alors pas retenu dans le nom officiel, sauf s’il constitue le seul élément du toponyme d’origine, ou sauf si le retranchement du générique séparé aurait pour effet de compromettre la grammaticalité ou la compréhension du nom officiel, pour les personnes parlant la langue autochtone du générique en question. Par ailleurs, pour contrer l’accueil mitigé souvent réservé aux noms autochtones trop longs et estimés difficiles à prononcer ou à mémoriser, la Commission pourra officialiser des versions raccourcies de noms inventoriés, pourvu que leur sens ne s’en trouve pas altéré. La Commission pourra supprimer notamment les génériques agglutinés à la partie spécifique des noms. Le raccourcissement des noms devra se faire en collaboration avec un représentant de la nation concernée.
Lorsqu’un toponyme autochtone ne comporte pas de générique dans son état originel, la Commission, si elle l’officialise, lui ajoute un générique français, dans la mesure où ce type de toponyme s’exprime habituellement avec un générique en français.
La Commission conserve comme variantes de noms officiels toutes les formes autochtones d’origine qu’elle a relevées et normalisées, y compris la version complète des noms qu’elle a raccourcis, de même que les formes autochtones d’origine qui se rapportent à un nom officiel non autochtone.
Pour l’officialisation des toponymes autochtones, on utilise les caractères de l’alphabet latin.
Les variantes peuvent comporter des signes diacritiques propres à une langue autochtone ou se présenter dans l’alphabet local.
Date de la dernière mise à jour : 2023-08-03