Origine et signification
Ressortissant jadis à la seigneurie de La Durantaye, cette municipalité de la région de Bellechasse se situe à 8 km à l'est de Saint-Michel-de Bellechasse et à 10 km environ au nord de Saint-Raphaël. La rivière Boyer, qui coule dans l'extrémité nord-ouest du territoire, comptait quelques moulins construits sur ses bords, au début du XVIIIe siècle. Les rivières Blanche et des Mères complètent le réseau hydrographique important du territoire vallierois.
Les premiers colons se sont installés en ces lieux vers 1700. Il s'agit de miliciens qui habitaient des paroisses de l'île d'Orléans. Suivant Gaston Deschênes, la paroisse de Saint-Vallier a été érigée en 1714 sous le patronage de saint Philippe et de saint Jacques et correspondait alors à la moitié est de la seigneurie de La Durantaye, scindée en deux paroisses réparties de chaque côté de la rivière Boyer. En 1716, la partie est a été cédée à Louis-Joseph Morel de La Durantaye (1671-1756) par son père, le seigneur Olivier Morel de La Durantaye (1640-1716), et l'autre partie a été partagée entre ses enfants. En 1720, Louis-Joseph Morel a cédé sa portion aux religieuses de l'Hôpital Général. Puisqu'il avait servi d'intermédiaire lors de cette transaction, monseigneur Jean-Baptiste de La Croix de Chevrières de Saint-Vallier (1653-1727), deuxième évêque de Québec (1688-1727), a inspiré la nouvelle désignation des lieux, Saint-Vallier. Les Dames Hospitalières, qui ont administré la seigneurie jusqu'en 1767, portaient une affection toute particulière à l'endroit de celui qui avait fondé leur institution en 1692. Monseigneur de Saint-Vallier a d'ailleurs vécu à l'Hôpital Général de 1713 à sa mort.
D'autre part, la graphie St-Valier peut être relevée sur une carte de Joseph Bouchette de 1831 et dans quelques documents anciens. En 1958, une petite partie du territoire, à peine 1,3 km², est détachée pour donner naissance à la municipalité du village de Saint-Vallier. À nouveau réunis en 1993, ils forment désormais la nouvelle municipalité homonyme.
On ne peut évoquer Saint-Vallier sans songer au personnage de La Corriveau qui habitait à cet endroit. Marie-Josephte Corriveau (1733-1763) eut deux maris dont le second a été victime de meurtre. À la suite d'un procès retentissant, elle a été condamnée à mort le 15 avril 1763 par un tribunal militaire anglais et pendue sur les buttes à Nepveu (plaines d'Abraham). Pour faire un exemple, son cadavre a été placé dans une cage de fer accrochée à la fourche des quatre chemins se croisant à Pointe-Lévy. Un siècle plus tard, la légende s'emparant de cette histoire, on a soutenu que ses deux, puis quatre maris (?) ont été victimes d'assassinat. Les textes d'Aubert de Gaspé, de Kirby et de Fréchette ainsi que les œuvres de Massicotte, Julien, Laliberté et Clark contribuèrent à la diffusion de cette histoire criminelle. Que de récits terrorisants n'a-t-on pas bâtis autour de bruits de chaînes, de passants attaqués, de sabbats à l'île d'Orléans auxquels le spectre de La Corriveau aurait assisté!
De jolies érablières étaient jadis exploitées à Saint-Vallier. L'importance de cette localité s'explique par la présence de divers commerces, par la précieuse industrie du meuble informatique qu'on y trouve, par la gare et la route qui ont favorisé par le passé les communications. Grâce à la présence d'une plage, la villégiature a connu, jadis, une certaine vogue. Une croix, plantée un peu plus à l'ouest de la municipalité, rappelle le souvenir de Prisque Bélanger, réputé être le premier colon de l'endroit.
Notice biographique
Jean-Baptiste de La Croix de Chevrières de Saint-Vallier (Grenoble, France, 1653 – Québec, 1727) est le deuxième évêque de Québec, exerçant ce ministère entre 1688 et 1727. Issu de la noblesse du Dauphiné, il se destine à une carrière ecclésiastique dès son jeune âge et obtient, en 1672, une licence en théologie du Séminaire de Saint-Sulpice, à Paris. Bien qu'il soit ordonné prêtre en 1681, Saint-Vallier est nommé aumônier ordinaire du roi Louis XIV (1638-1715) en 1676. Plus doctrinaire qu'ambitieux, il est désigné en 1685 pour succéder à monseigneur François de Laval (1623-1708) en tant qu'évêque de Québec. Après un premier séjour de 18 mois en Nouvelle-France au cours duquel il parcourt le territoire de son futur diocèse – lequel correspond à l'ensemble des vastes possessions françaises en Amérique du Nord –, Saint-Vallier est sacré évêque en 1688.
Prélat très actif, Saint-Vallier voit à la construction d'un évêché dès son arrivée à Québec et accorde une grande importance à l'évangélisation des populations autochtones. Il est également à l'origine de la fondation de l'hôpital général de Québec (1692) et du monastère des Ursulines de Trois-Rivières (1697). De même, il érige plusieurs paroisses dans son diocèse, leur nombre doublant, de 41 à 82, entre 1690 et 1721.
Or, tout au long de son épiscopat, Saint-Vallier cherche à affirmer son autorité sur l'ensemble du clergé de la Nouvelle-France et se démarque par son zèle dans la lutte contre l'immoralité. Ses positions intransigeantes et son caractère autoritaire l'amènent à se quereller, entre autres, avec les prêtres du Séminaire de Québec, les Jésuites ainsi que les gouverneurs Louis de Buade de Frontenac (1622-1698) et Philippe de Rigaud de Vaudreuil (1650-1725). De fait, à deux reprises – de 1694 à 1697 et de 1700 à 1713 –, il doit même effectuer de longs séjours en France afin de défendre ses politiques à la cour. D'ailleurs, en 1704, dans le contexte de la guerre de la Succession d'Espagne, Saint-Vallier est capturé par des marins anglais en revenant d'Europe. Prisonnier pendant 5 ans, il ne regagne finalement la colonie qu'en 1713, après presque 13 ans d'absence. Pendant ce long exil, il publie le Catéchisme du diocèse de Québec (1702) et le Rituel du diocèse de Québec (1703).
À la suite de son retour en Nouvelle-France, Saint-Vallier s'installe à l'hôpital général de Québec, où chaque jour, jusqu'à son décès, il célèbre la messe pour la communauté et, si les devoirs de sa charge le lui permettent, visite les malades et administre les derniers sacrements aux mourants. Bien que peu populaire en raison de son intransigeance, Saint-Vallier s'attire le respect par sa piété et sa charité tout en contribuant activement à consolider l'Église catholique en Amérique du Nord au cours de son épiscopat.
Sources
Noms et lieux du Québec, ouvrage de la Commission de toponymie paru en 1994 et 1996 sous la forme d'un dictionnaire illustré imprimé, et sous celle d'un cédérom réalisé par la société Micro-Intel, en 1997, à partir de ce dictionnaire.
Dictionnaire biographique du Canada (consulté le 15-07-2021)
Répertoire du patrimoine culturel du Québec (consulté le 15-07-2021)
Site Web de la Ville de Québec (consulté le 15-07-2021)