À propos de la Commission
Le premier organisme de toponymie au Québec a été créé officiellement en 1912. Il ne faudrait toutefois pas oublier que le Québec gère sa toponymie depuis plus longtemps. Au cours du XIXe siècle déjà, le gouvernement avait confié à un fonctionnaire de l'Administration la responsabilité de s'occuper des diverses questions relatives aux noms géographiques du territoire, notamment en ce qui concerne le choix des nouveaux noms de lieux de même que la révision et le contrôle des appellations géographiques sur les cartes, plans et autres documents produits par les ministères.
En 1907, le Québec désigna un représentant à la Commission de géographie du Canada, organisme qui avait été créé en 1897. C'est le géographe Eugène Rouillard, secrétaire au « département » des Terres et Forêts, docteur ès lettres et officier de l'Académie française, qui fut nommé membre de cette commission fédérale.
Une Commission géographique de la Province de Québec fut d'abord instituée par un arrêté en conseil le 15 novembre 1912. Lui succéda la Commission de géographie officiellement créée par une loi sanctionnée le 14 février 1920. Cet organisme, qui relevait du ministre des Terres et Forêts, a évolué sous cette appellation jusqu'au 26 août 1977, alors que fut sanctionnée la Charte de la langue française qui instituait officiellement la Commission de toponymie. Les activités des deux premières Commissions se répartissent en trois périodes dont les étapes importantes sont les suivantes :
Dans l'arrêté en conseil de 1912 qui nommait les six membres de la Commission géographique, y compris son premier président, Eugène Rouillard, on énumérait les motifs invoqués par les autorités gouvernementales pour la création de cet organisme :
Dans l'arrêté en conseil du 6 avril 1920 faisant suite à la sanction de la loi, il était stipulé que seize fonctionnaires étaient nommés membres de la Commission de géographie sans toutefois désigner nommément un président. Il était en outre précisé que « la Commission décidera de toute question ayant trait à la désignation et à la dénomination des lieux et des accidents géographiques de la province de Québec. Notamment, elle déterminera les nouvelles appellations géographiques; au besoin, elle rectifiera les anciennes ou en fixera l'orthographe; et elle pourra établir des règles de nomenclature qui soient obligatoires pour tous les services de l'Administration provinciale. Mais les décisions de la Commission seront sujettes à l'approbation du ministre des Terres et Forêts. »
En plus de remplir le mandat qui lui fut confié, la Commission a réalisé des publications pour faire connaître ses décisions. Elle a ainsi fait paraître trois rapports, en 1916, en 1921 et en 1926, ce dernier avec une édition anglaise également, contenant ses décisions sur les noms de lieux du Québec. Ces publications, estimait-elle, avaient paru indispensables pour assurer l'uniformité des dénominations géographiques inscrites sur les différents plans et cartes dressés par les ministères. C'est aussi dans cet esprit que furent publiés deux Dictionnaires des rivières et lacs de la province de Québec, en 1914 et en 1925, en collaboration avec le ministère des Terres et Forêts.
La Commission de géographie n'a pas tenu de séance de 1939 à 1962. Par arrêté en conseil daté du juin 1941, un employé du ministère des Terres et Forêts, Isaïe Nantais, fut nommé secrétaire de la Commission en remplacement de J.-E. Beauchamp; il fut assisté d'un adjoint. Énumérons les principales activités qui ont été effectuées au cours de cette période : le choix de nombreuses dénominations toponymiques nouvelles sur tout le territoire, les multiples vérifications et contrôles des noms de lieux, en particulier sur les cartes préparées par les différents ministères du Québec et du Canada, l'établissement d'un fichier toponymique un peu plus élaboré, les informations toponymiques fournies aux ministères et aux citoyens, la rédaction d'un Dictionnaire des lacs du Québec (demeuré à l'état de manuscrit dactylographié). Donc au cours de ces vingt années, les activités toponymiques ont été nombreuses et variées, quoique aucune décision n'ait eu de caractère officiel, à l'exception des noms de cantons qui ont été dans chaque cas approuvés par le ministre des Terres et Forêts.
La Commission de géographie fut reconstituée lorsque le gouvernement nomma sept membres par arrêté en conseil en date du 6 avril 1962. Les décisions des commissaires furent soumises après chaque séance au ministre responsable en vertu de l'article 4 de la Loi de la Commission de géographie qui stipulait que « toutes les décisions de la commission sont sujettes à l'approbation du ministre et ont force et effet après leur publication dans la Gazette officielle du Québec. » Pour se conformer également à cet article de la Loi de la Commission, le ministre des Terres et Forêts avait approuvé, le 5 décembre 1968, les noms que contenait le Répertoire géographique du Québec et la publication requise de ses quelque 45 000 noms a été faite dans le numéro spécial de la Gazette officielle du Québec du 15 mars 1969. Cet ouvrage a par la suite été publié comme étude toponymique de la Commission. La réalisation de ce répertoire avait été rendue possible grâce aux recherches effectuées à la fois par la Commission de géographie et le Comité permanent canadien des noms géographiques. C'est en 1968 que la Commission a publié un Guide toponymique du Québec pour la première fois. À cause de la publication de cartes géographiques plus nombreuses et produites à des échelles de plus en plus détaillées, cette période fut aussi marquée, en particulier, par la multiplication des enquêtes de terrain, y compris en milieu autochtone. Soulignons aussi qu'à partir de 1962, le Québec a participé aux réunions annuelles du Comité permanent canadien des noms géographiques. Notons également que le secrétaire de la Commission de l'époque, Jean Poirier, a fait partie des délégations canadiennes lors des Conférences des Nations Unies sur la normalisation des noms géographiques qui se sont tenues à Genève (1967), à Londres (1972) et à Athènes (1977).
Pendant plusieurs années, la Commission de géographie avait déploré que la poursuite de ses objectifs était souvent freinée par une accumulation de problèmes dont principalement ceux de compétence en matière de noms géographiques. Pour étudier cette question, elle a donc créé un comité ad hoc qui lui a présenté son Rapport sur les juridictions en matière de noms géographiques le 22 octobre 1976. Celui-ci insistait sur la nécessité d'une réforme dont en premier lieu la consolidation du rôle de la Commission. Le 26 août 1977, la Commission de géographie devenait la nouvelle Commission de toponymie. Par arrêté en conseil en date du 19 juillet 1978, sept personnes en furent nommées membres dont son président, le géographe et toponymiste Henri Dorion. Cet organisme se voyait, par la Charte de la langue française, confier des devoirs et des pouvoirs considérablement élargis par rapport à l'ex-Commission de géographie.
Parmi les activités majeures que la Commission a réalisées, citons seulement, à titre d'exemple, la confection du Répertoire toponymique du Québec publié en 1979, contenant environ 60 000 noms de lieux officiels. L'année 1984 vit la Commission de toponymie organiser à Québec, conjointement avec la Fédération des sociétés d'histoire du Québec, le Premier Congrès international sur la toponymie française en Amérique du Nord (COTOFAN). Les actes de ce congrès ont été publiés en 1986; ils comprennent plus de 60 contributions qui en font la somme toponymique la plus importante, à ce jour, à faire l'objet d'une publication sur la toponymie française d'Amérique. En 1985, à la demande des Nations Unies, la Commission participa activement à un Stage de formation en matière de toponymie pour pays de langue arabe tenu à Rabat (Maroc). L'année du 75e anniversaire de la Commission de toponymie vit la tenue au Québec de deux événements d'envergure internationale à l'organisation desquels la Commission participa activement : à Montréal eut lieu la Cinquième Conférence des Nations Unies sur la normalisation des noms géographiques, tandis qu'à Québec, le XVIe Congrès international des sciences onomastiques tint ses assises.
Pour prendre des décisions éclairées, la Commission s'appuie sur la participation locale et régionale, principalement en impliquant les sociétés historiques, les conseils municipaux, les conseils de bande autochtones, préoccupés par la toponymie de leur territoire, de façon à respecter le plus possible les désirs des populations concernées quant à la dénomination de leurs territoires respectifs. Sur le plan de la normalisation nationale et internationale, la Commission a été présente à plusieurs réunions, notamment à celles du Comité permanent canadien des noms géographiques, aux Conférences quinquennales des Nations Unies sur la normalisation des noms géographiques, ainsi qu'aux sessions du Groupe d'experts des Nations Unies pour les noms géographiques.
En 1987, plusieurs publications ont vu le jour à la Commission de toponymie, dont un nouveau Répertoire toponymique du Québec qui comprend plus de 100 000 noms de lieux et près de 700 000 éléments d'information.
Cette décennie voit la Commission informatiser le traitement des noms de lieux en vue de leur officialisation, de même que l’enregistrement de ses décisions. Le traitement des noms de voies de communication connaît une accélération, grâce à une entente de collaboration conclue avec le Directeur général des élections. Ainsi, durant cette période, le nombre de noms de voies de communication officiels franchit la barre des 50 000 et le nombre de noms de lieux autres que des noms de voies de communication, celle des 100 000. En 1996-1997 seulement, la Commission officialise plus de 15 000 noms de voies de communication. Elle publie une édition revue et enrichie du Guide toponymique du Québec (1990), où se retrouvent codifiés, principalement, ses politiques toponymiques, de même que ses règles d’écriture et critères de choix. Par ailleurs, l’expertise toponymique québécoise rayonne outre frontières : en collaboration avec le Groupe d’experts des Nations Unies pour les noms géographiques, la Commission de toponymie organise, à l’Université Laval, à Québec, un stage de formation en toponymie à l’intention des pays francophones du Sud (1988). En 1994, elle conclut, avec les autorités toponymiques de la France une entente de collaboration, qui produira des effets très positifs. L’événement le plus marquant, toutefois, est sans conteste la publication de Noms et lieux du Québec, un dictionnaire de plus de 6 000 articles sur les toponymes du Québec, et plus de 500 illustrations et 35 cartes, un ouvrage scientifique et accessible tout à la fois, qui présente le patrimoine toponymique national.
D’importants changements apportés à la gestion de la Commission et à ses méthodes et procédures caractérisent la période la plus récente. Depuis 1997, la Commission de toponymie et l’Office québécois de la langue française sont dirigés par une même personne. En outre, depuis novembre 2004, ces deux organismes partagent des locaux à Québec. La Commission voit toutefois confirmer son statut d’organisme gouvernemental autonome en 2002. À compter de 2001-2002, la Commission fait connaître les services qu’elle s’engage à offrir au public dans le cadre de sa Déclaration de services aux citoyens et prend part au processus de reddition de comptes devant les élus de l’Assemblée nationale, à l’instar des autres ministères et organismes de l’Administration. Par ailleurs, la toponymie officielle devient accessible en ligne, sur le Web, en tout temps et gratuitement, à compter de 1998. Le nombre de noms de voies de communication officiels et celui des noms de lieux officiels autres que des odonymes franchissent le cap des 100 000 et des 120 000 respectivement. Le regroupement de municipalités en vue de créer de plus grandes villes conduit à mettre en place, en collaboration avec les villes qui le désirent, un traitement de réduction des noms identiques au sein des grands corpus odonymiques. Du côté du rayonnement international de l’expertise toponymique québécoise, le projet cher au président Henri Dorion de créer une Division francophone au sein du Groupe d’experts des Nations Unies pour les noms géographiques se réalise finalement en 1998. La création de cette unité vouée au service des États francophones de l’ONU stimule le partenariat toponymique franco-québécois, très actif au sein de la Division; le traitement des exonymes de langue française et la mise en place d’un cours de formation à la gestion de la toponymie occupent l’avant-scène. De plus, la Commission échange avec les autorités toponymiques de la Catalogne (1998) et participe à une session de formation en toponymie au Pays Basque (2000). Enfin, à l’automne 2004, la Commission entreprend de produire, de concert avec les Publications du Québec, une version augmentée de son dictionnaire Noms et lieux du Québec, dont le lancement a eu lieu à l'automne 2006.
Haut de page »Date de la dernière mise à jour : 2012-06-26