Chroniques
Retraçons les origines des toponymes Hochelaga, Ville-Marie et Montréal, qui ont tous trois désigné, à différentes époques, le lieu où est située l’actuelle métropole.
Le premier nom connu pour désigner le territoire où est située la Ville de Montréal est Hochelaga. Ce nom sert alors d’appellation pour un village établi au pied du mont Royal. En 1535, le navigateur malouin Jacques Cartier (1491-1557) débarque en ces lieux. Selon son estimation, plus de 1 000 personnes y vivent à ce moment-là. Plusieurs décennies plus tard, en 1603, lorsque Samuel de Champlain explore à son tour le fleuve Saint-Laurent, le village n’existe plus. Sa disparition demeure d’ailleurs un mystère. Quant au terme iroquoien hochelaga, il signifierait « entre deux monts » et il ferait vraisemblablement référence à l’emplacement du village, voisin du mont Royal. Or, il pourrait également s’agir d’une variante d’osekare, vocable qui peut être traduit par « chaussée de castors », ou d’osheaga, qui signifierait « gros rapides ».
Carte du village d’Hochelaga
© Bibliothèque et Archives Canada, Acc. No. R9266-3416 Peter
Winkworth Collection of Canadiana
Toujours est-il qu’il faut attendre l’année 1642 pour qu’un lieu habité reçoive un nom français sur ce territoire. Il s’agit de Ville-Marie, fondée à proximité de l’ancien village iroquois d’Hochelaga par une soixantaine de pionniers, dont les plus célèbres demeurent Paul de Chomedey de Maisonneuve (1612-1676) et Jeanne Mance (1606-1673). Alors que la fondation de Québec en 1608 a été motivée par des impératifs d’ordre religieux, économique et politique, celle de Ville-Marie est essentiellement déterminée par un besoin d’évangélisation, comme en témoigne le nom de la société à l'origine de son établissement : Société de Notre-Dame de Montréal pour la conversion des Sauvages de la Nouvelle-France. Le nom Ville-Marie a d’ailleurs été donné en l’honneur de la Vierge Marie.
Si la provenance des toponymes Hochelaga et Ville-Marie semble faire relativement consensus, on ne peut en dire autant de celle de Montréal. Deux hypothèses se démarquent à ce propos. La première, retenue par la Commission de toponymie, défend l’idée que Montréal est une variante de Mont Real ou de Mont Royal. En effet, rappelons qu’au cours de l’un de ses voyages, Jacques Cartier baptise le mont au cœur de l’île montréalaise Mont Royal. Quelques années plus tard, sur un plan dressé par le Vénitien Giacomo Gastaldi, on trouve l’appellation Monte Real. L’emploi du mot Real, au lieu de l’italien Reale ou Regale, demeure inexpliqué. Notons toutefois qu’au XVIe siècle, en France, royal s’écrit aussi real. De son côté, la carte de Champlain datée de 1612 indique le nom de Montreal pour identifier le mont, alors que dans son livre publié en 1632, on trouve la forme Mont Royal. Le fondateur de Québec note aussi que l’île s’appelle Isle de Mont-Real. Bien que le 18 mai 1642, Paul de Chomedey de Maisonneuve nomme le lieu Ville-Marie, Jeanne Mance, elle, utilise le toponyme Mont Royal, le 30 juin 1672, sur une plaque retrouvée enfouie sous la première église paroissiale. Le nom Montréal deviendra progressivement l’appellation en usage dans les documents administratifs dès la fin du XVIIe siècle et il supplantera définitivement celui de Ville-Marie au début du XVIIIe siècle.
Une seconde hypothèse favorise plutôt l’idée selon laquelle le toponyme Montréal pourrait en fait être une référence à un contemporain de Jacques Cartier. En effet, lors de son deuxième voyage au Canada, en 1535, le grand navigateur écrit que, pour aller à Hochelaga, il était accompagné de Claude Pontbriant dit de Montréal, fils de Pierre de Pontbriant, seigneur de Montréal, en France. De plus, dans la Relation de ce qui s’est passé en la Nouvelle-France en l’année 1642, le père Barthelemy Vimont écrit que, le 17 mai 1642, « le Gouverneur mit le sieur de Maisonneuve en possession de cette île, au nom de Messieurs de Montreal, pour y commencer les premiers bâtiments ». Auparavant dans ce texte, l’île en question est clairement identifiée comme étant l’isle de Montreal. Enfin, notons qu’en 1968, le maire de la métropole, Jean Drapeau, a envoyé une lettre au propriétaire du château de Montréal, dans le Périgord, lui reconnaissant la très probable paternité patronymique de sa ville.
* Mention de source du bandeau Montréal raconté par ses noms de lieux : © Ville de Montréal, Bureau du patrimoine, de la toponymie et de l'expertise.
Chronique parue le 18 janvier 2017.
Date de la dernière mise à jour : 2023-08-03