Chroniques
Des quatre monarques rappelés, c’est, et de loin, Victoria (1819-1901) qui est la plus commémorée dans la toponymie. En effet, il y a 54 noms de lieux officiels qui la rappellent. Au passage, notons que la ville de Victoriaville, le parc Victoria à Québec et le pont Victoria, reliant Montréal à la rive sud, ont été ainsi nommés en son honneur. Le long règne de Victoria, qui va de 1837 à 1901, explique assurément sa forte présence dans notre toponymie.
Au décès de Victoria, son fils aîné, Édouard VII (1841-1910), lui succéda. Son règne (1901-1910) fut cependant beaucoup plus bref que celui de sa mère. Notons qu’il y a quatorze noms de lieux qui rappellent son souvenir, notamment celui de Haut-fond Prince, dont l’histoire est particulièrement amusante. En 1860, le prince Édouard naviguait sur le bateau HMS Hero et il se dirigeait vers Montréal pour inaugurer le pont Victoria. Au cours du trajet, la coque du navire s’est frottée contre un haut-fond qui se trouvait à quelque 5 km au sud-est de l’entrée de la baie de Tadoussac. Dès lors, on a décidé de laisser en permanence un bateau-phare près de ce haut-fond; celui-ci a été remplacé en 1964 par un phare dénommé La Toupie. Évidemment, c’est à la suite de cette péripétie que le haut-fond a reçu son nom en l’honneur du prince Édouard, futur Édouard VII.
Après Édouard VII régnèrent successivement Georges V (1865-1936) et Édouard VIII (1894-1972). Quinze noms de lieux rappellent le souvenir du premier, mais aucun ne rappelle celui du second, qui abdiqua après quelque dix mois de règne, et ce, avant même son couronnement.
Enfin, ce fut le frère d’Édouard VIII, Georges VI (1895-1952), qui lui succéda sur le trône. Celui-ci fut le premier roi britannique à venir au Canada, en 1939, juste avant le début de la Deuxième Guerre mondiale. Durant son séjour d’un mois, il visita plusieurs villes, dont Québec. D’ailleurs, dans le film Les Plouffe (1981), une adaptation du roman de Roger Lemelin, on fait allusion à cette visite. En effet, Théophile Plouffe, le père de la famille, refuse de décorer sa maison de la basse-ville de Québec, laquelle se trouve sur le parcours du cortège royal. Cinq noms de lieux rappellent le souvenir de Georges VI.
Finalement, aucun nom de lieu ne rappelle officiellement le souvenir d’Élisabeth II ou de Charles III. Notons en effet qu’une personne doit être décédée depuis plus d’un an pour que la Commission officialise un nom de lieu désigné en son honneur.
En terminant, nous vous invitons, à l’approche de la Journée nationale des patriotes, à consulter notre carte Figures marquantes du mouvement patriote, qui met en lumière quelque 200 noms de lieux rappelant douze figures politiques, intellectuelles ou engagées dans l’action du mouvement patriote québécois du XIXe siècle.
Chronique parue le 18 mai 2023.
Chaque année, à l’occasion du Gala des Mérites du français de l’Office québécois de la langue française, la Commission de toponymie décerne le Mérite en toponymie à une personne ou à un organisme afin de souligner son implication exemplaire pour le rayonnement de la toponymie du Québec.
Le 15 mai dernier, le Mérite en toponymie 2023 a été attribué à Henri Dorion, géographe, juriste, professeur et auteur. D’ailleurs, son dernier ouvrage, publié il y a peu et intitulé La toponymie, une science, un vocabulaire, une gestion, constitue un véritable traité sur la toponymie.
Au cours de sa brillante carrière, Henri Dorion a notamment été président de la Commission de toponymie pendant huit ans, au cours de trois mandats non consécutifs. En lui attribuant le Mérite en toponymie, la Commission a voulu rendre hommage à son dévouement indéfectible envers la mise en valeur du territoire québécois et de sa toponymie.
Date de la dernière mise à jour : 2023-05-16